Saisie en septembre 2008 d’une réclamation du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI) au sujet du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active (RSA), la Halde (haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité) s’est notamment penchée, dans sa délibération n° 2008-228 du 20 octobre 2008, sur l’exclusion des moins de 25 ans du dispositif.
« Le collège de la Haute autorité constate l’existence d’une différence de traitement fondée sur l’âge des personnes actives, seuls les salariés de plus de 25 ans pouvant bénéficier de l’accompagnement financier prévu par le nouveau dispositif. Or, une telle différence de traitement n’est licite que si elle est justifiée de façon objective et raisonnable. »
On verra ci-dessous que si cette justification pouvait sembler légitime avec le RMI, elle devient plus que fragile avec le RSA, dont la finalité est bien différente.
L’intégralité de la délibération : http://www.halde.fr/IMG/pdf/2008-228.pdf
Extrait de la délibération concernant la condition d’âge :
" b/ La condition d’âge
Selon la réclamation, la condition d’âge (plus de 25 ans) fixée pour le bénéfice du RSA par l’article 2 (alinéa 24) du projet de loi est de nature à constituer une discrimination fondée sur l’âge.
Au niveau communautaire, la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ne paraît pas pouvoir s’appliquer en l’espèce, le considérant n° 13 excluant de son champ d’application les « versements de toute nature effectués par l’Etat qui ont pour objectif l’accès à l’emploi ou le maintien dans l’emploi ».
Au niveau européen, le Collège de la haute autorité relève que, s’agissant du RMI, le Comité européen des droits sociaux du Conseil de l’Europe a estimé, sur le fondement de l’article 13 (Droit à l’as sistance sociale et médicale) de la Charte sociale révisée, que : « l’exclusion des personnes de moins de vingt -cinq ans du RMI et l’insuffisance des autres mesures d’assistance sociale prévues pour ces personnes en cas de besoin ne sont pas conformes à cette disposition de la Charte » (Conclusions XV-1 - 01/01/2000).
Surtout, le Collège de la haute autorité constate que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme contraint les Etats membres du Conseil de l’Europe, lorsqu’ils mettent en pl ace une législation prévoyant le versement automatique d’une prestation sociale, au respect des dispositions combinées de l’article 14 de la Convention prohibant les discriminations et de l’article 1er du 1er Protocole additionnel garantissant le respect des biens.
En l’espèce, l’article 2 du projet de loi généralisant le RSA, dispose que le bénéficiaire doit « être âgé de plus de vingt-cinq ans ou assumer la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître ».
Une condition d’âge identique a été mise en place par l’article 2 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 relative au RMI dans le but d’inciter les jeunes de moins de 25 ans à se diriger vers les dispositifs de formation et le marché de l’emploi.
L’article 1er de la loi énonçait en effet que « toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l’économie et de l’emploi, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ».
Au regard de la nature de la prestation, la condition d’âge pouvait ainsi paraître adaptée au but visé, lequel consistait à éviter de faire du RMI une « trappe à inactivité » susceptible de dissuader les jeunes de moins de 25 ans de se former ou de travailler.
Or, la finalité du RSA paraît sensiblement différente de celle du RMI. Selon l’exposé des motifs du projet de loi, il s’agit à travers ce texte, de « faire des revenus du travail le socle des ressources des individus et le principal rempart contre la pauvreté ». Selon l’article 1er du projet de loi, le RSA « garantit à toute personne, qu’elle soit ou non en capacité de travailler, de disposer d’un revenu minimum et de voir ses ressources augmenter quand les revenus qu’elle tire de son travail s’accroissent ».
Le dispositif mis en œuvre prévoit, en particulier, un complément de revenu pour les foyers dont les membres ne tirent que des ressources limitées de leur activité ; selon l’exposé des motifs du projet de loi, « le mécanisme est conçu de telle sorte que toute progression des ressources tirées de l’exercice d’une activité professionnelle se traduise par une baisse du RSA inférieure au montant de cette progression, aux fins que le ressources globales de la famille progressent en raison des revenus d’activité perçus ».
Au regard de ces éléments, le Collège de la haute autorité constate l’existence d’une différence de traitement fondée sur l’âge des personnes actives, seuls les salariés de plus de 25 ans pouvant bénéficier de l’accompagnement financier prévu par le nouveau dispositif. Or, une telle différence de traitement n’est licite que si elle est justifiée de façon objective et raisonnable, c’est -à-dire si elle poursuit un but légitime et qu’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
Interrogé sur ce point, le Haut commissaire aux Solidarités actives n’a adressé à la haute autorité aucune observation.
En conséquence, le Collège de la haute autorité demande au Haut commissaire aux Solidarités actives que soit réalisée une étude sur les conséquences de la condition d’âge fixée pour les bénéficiaires du RSA, au regard en particulier des difficultés d’insertion sociale et professionnelle des jeunes âgés de moins de 25 ans. "
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