Lilian Thuram, l’anti-racisme et l’âgisme
vendredi 8 novembre 2019
par webmaster

Dans un récent et très intéressant entretien donné à Streetpress, Lilian Thuram, le célèbre président d’une fondation qu’il a créée, Education contre le racisme, répond à différentes questions, sur le racisme précisément.

(https://www.streetpress.com/sujet/1572451169-lilian-thuram-va-vers-une-societe-de-la-haine)

Celui dont il a été directement victime – dans les stades, par exemple, quand des supporters lancent des « cris de singes » destinés aux joueurs noirs ; dans son enfance, quand sa couleur de peau lui était renvoyée comme un stigmate.

Il évoque également d’autres formes de discriminations, sexisme, homophobie… Ce qui n’est pas surprenant car il existe en effet entre toutes les formes de discriminations, des processus communs : notamment le fait de réduire l’autre à une de ses caractéristiques, d’en faire un critère d’infériorité…

Il conclut, ce qui est en effet valable pour toutes : « On peut stigmatiser n’importe qui sur des critères qui n’ont pas de sens, et pourtant ça prend ! »

A tous ces aspects, il faudrait aussi ajouter qu’il y a dans les racismes quels qu’ils soient un autre phénomène : non seulement on réduit la personne à un critère (couleur de peau, genre, âge, religion…) mais on ne se contente pas de rester sur ce critère : on lui associe aussitôt un ensemble d’autres caractéristiques (de caractère, de comportement, etc.) dont il s’accompagne forcément : et voilà tous les homosexuels, les noirs, les femmes voilées, etc., qui sont pareil, pensent pareils, vivent pareil, veulent pareil…

Bref, on est donc surpris dans le cadre de cet entretien intéressant qui témoigne de la manière intelligente et nuancé dont ce monsieur parle du racisme, de le voir soudain tenir de tels propos à une question portant sur les difficultés de la lutte contre le racisme :

« Beaucoup sont crispés lorsqu’on amène un nouveau concept et un nouveau regard sur la société. Mais je reste persuadé que les jeunes générations vont changer les choses. Et malheureusement, dans l’espace public, on entend encore trop souvent les personnes âgées. »

D’accord évidemment sur les crispations. Mais donc seulement à cause des « vieilles générations » ? Pas de racisme dans les pays démographiquement très jeunes ?

Et ce sont en matière de racisme les « personnes âgées » qui culminent, ces "personnes âgées" qu’on voit et qu’on entend partout, et dont la parole envahit l’espace public ?

Alors, il est possible que L. Thuram et nous n’ayons pas la même définition de ce qu’est une « personne âgée » et qu’il classe dans les « personnes âgées » des gens comme Zemmour ou Finkielkraut.

Mais il est certain que, indépendamment de l’âge qu’on leur associe, s’il est bien une catégorie qui n’existe pas (à part d’un point de vue démographique), c’est bien celle « les personnes âgées ».

Voilà donc que L Thuram fait avec « les personnes âgées » ce qu’il vient de dénoncer. Prendre un seul critère, et y associer… ici, le soupçon du racisme.

Les personnes âgées, pensent donc toutes pareil, et sont donc toutes crispées...

On pense aux milliers de militantes et de militants anti-racistes ayant plus de 70 ans. Ils vont aimer.

On pense aux dizaines de milliers d’électrices et d’électeurs de plus de 60 ans qui, à chaque élection depuis 20 ans, votent beaucoup moins pour le parti fascisant que les électeurs de moins de 45 ans.

On pense aux « cris de singes » et on s’interroge : sont-ils lancés par des octogénaires qui occupent majoritairement les tribunes des stades de foot ?

Que conclure ?

Sans doute que cette forme de discrimination qu’est l’âgisme est actuellement tellement banalisé que même des gens qui luttent contre le racisme, l’homophobie, etc., font avec le critère de l’âge ce qu’ils ne veulent à juste titre plus qu’on fasse avec les autres.

Mais laissons la parole à M. Thuram pour une belle phrase de son entretien à laquelle nous ajouterons juste deux parenthèses. C’est un « conseil à ses enfants » :

« Ne tombez pas dans ce piège. Par contre, vous ne faites pas la même chose. Si une personne (jeune ou âgée) vous agresse sur votre couleur de peau, ne pensez pas que toutes les personnes de sa couleur (ou de son âge) pensent de la même façon. »

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Elections 2017. A partir de 50 ans, le vote Marine Le Pen décroît au fur et à mesure que l’âge des électrices et électeurs augmente :

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