Imaginons un monsieur, dont on nous dit qu’il est atteint de narcolepsie. Et que donc il peut soudainement s’endormir au volant. Ce qui expliquerait (à moins que ce soit un chauffard non malade) qu’en 30 ans, ledit monsieur ait déjà causé la mort de trois personnes : une en 1989, une seconde en 1997, une troisième cette année.
Excédés, et craignant pour leur sécurité, les habitants du village où ce monsieur habite viennent de lancer une pétition pour que son permis lui soit retiré. C’est alors que quelques journaux rendent compte de l’affaire et titrent :
Le Progrès : "Une pétition pour interdire de conduire à un homme de 77 ans."
Le Parisien : "Un village se mobilise pour empêcher un septuagénaire de conduire."
Que vient donc soudain faire l’âge du monsieur dans une affaire dont les habitants pétitionnaires expliquent pourtant qu’elle est liée à une maladie et qu’elle a causé le premier accident quand le monsieur avait 52 ans ?
Est-ce que les journalistes auraient titré "un trentenaire" s’il avait trente ans ? Est-ce qu’ils auraient titré "Un village se mobilise pour empêcher un homosexuel de conduire" si telle était l’orientation sexuelle du monsieur ? "Une pétition pour interdire de conduire à un protestant" ou à "un juif" si telle était sa religion ? Evidemment, non.
C’est bien parce qu’ils confondent en permanence âge et maladie qu’ils ne les différencient pas dans un tel titre, et qu’ils jugent personnellement qu’un conducteur de 75 ans est plus dangereux au volant qu’un de 25 ans (quand bien même les statistiques nous disent l’inverse !) qu’ils se permettent sans sourciller d’écrire cela.
Une forme d’âgisme d’autant plus insidieuse qu’elle se présente comme une évidence et renforce ainsi les clichés et la désinformation sur le sujet.
L’Observatoire de l’âgisme ne peut donc qu’espérer que nos villages se mobilisent aussi rapidement pour empêcher les journalistes âgistes d’écrire...